Compagnie des Hauts-fourneaux et Fonderies de Givors Établissements Prénat 1839-1960

 

Hauts-fourneaux  et Cokerie

   La fonderie, créée à Givors en 1839, nécessitait l'approvisionnement de fontes de Bourgogne et Anglaise, d'un prix élevé. La présence de nombreux gîtes de minerai dans un rayon restreint, le voisinage et l'accès facile, par eau, de Rive de Gier, où se fabriquait le « coak », qui commençait à supplanter, dans les hauts fourneaux, le charbon de bois; l'intérêt de produire des moulages en première fusion; enfin, l'assurance de l'écoulement des fontes grises et de puddlage, devaient naturellement conduire Messieurs Prénat et Génissieu à envisager sans tarder l'installation de hauts fourneaux en complément de la fonderie déjà en service.

   Dès octobre 1841, des négociations, financières et techniques, sont engagées avec Messieurs Laurens et Thomas.

Le haut fourneau N° 1 est allumé en avril 1843 et produit, de mai à décembre, 1291 tonnes de fonte, soit environ 5 tonnes par jour, dont 203 sous forme de mou­lages. La mise au mille de coke est de 1800 kg, le rendement du lit de fusion atteint à peine 30 %. Les minerais utilisés proviennent de Villebois, La Verpillière, Beaujeu, La Voulte.

Le haut fourneau N° 2 est mis à feu quatre ans plus tard, en mars 1847. La production de chacun des deux fourneaux est alors de 250 tonnes par mois. En dehors des fontes grises pour moulage, ils fabriquent des fontes blanches, lamelleuses, rayonnées ou truitées, réputées d'excellente qualité pour le puddlage.

En 1860, sir Henry Bessemer invente le procédé d'affinage par le vent. Pour se mettre en état de fournir des fontes « Bessemer », pauvres en phosphore et en soufre, Givors recherche et introduit à la charge de ses fourneaux des minerais plus riches, et purs, qui permettent, en même temps, de réduire la consommation de coke et d'augmenter le rendement. Des marchés de longue durée sont passés avec les Mines de Toscane, de l'île d’Elbe, de Seriphos (Grèce), de Mokta, puis de Fillols (Pyrénées) et de Palomares (Espagne).

Le tableau lumineux de chargement, les cowpers et le monte-charge du haut fourneau Joffre

   A ce moment, les deux hauts fourneaux, semblables comme profil, ont une hauteur d'environ 17 m., un diamètre au gueulard de 2 m. 300. Le diamètre aux tuyères est de 1 m. 60, chiffre élevé pour l'époque. La production mensuelle passe de 600 tonnes en 1863 à 800 tonnes en 1868.

   Le haut fourneau est enchâssé dans une vaste tour en maçonnerie, de section carrée à la base, percée d'embrasures voûtées. Le chargement s'effectue par monte-charge à balance d'eau. Les diverses matières composant la charge, amenées par tombereaux sur une aire proche du fourneau, sont chargées à la pelle dans les wagonnets à fond ouvrant poussés à bras sur un réseau à voie étroite.  

Wagonnets à fond ouvrant - 1913

     En raison du grand diamètre du gueulard, et pour assurer une répartition meilleure de la charge sur la circonférence, Monsieur Prénat conçoit et adapte à Givors  un appareil de fermeture et de chargement dont Percy donne la description dans son traité de Métallurgie, paru en 1865. « C'est à ces conditions de chargement que Monsieur Escalle attribue la production régulière des fontes-scories dans les hauts fourneaux de Givors, munis de cet appareil ».

Les fontes sont coulées en sable dans une halle couverte, les laitiers en cuves tronconiques qu'un cheval tire vers le crassier.

En 1907, la granulation des laitiers est appliquée. Un sécheur vertical permet de livrer du sable sec ensaché.

Les gaz du gueulard sont récupé­rés et alimentent huit chaudières. A l'origine non épurés, ils passent plus tard dans une tour à chicanes, qui assure une épuration grossière.  

Évolution constante de l'Usine

   Les premières soufflantes, N° 1 et 2, fournies par la maison Bietrix, sont horizontales. Une troisième machine, du type vertical, est livrée par Le Creusot en 1875, une quatrième par l’Horme en 1900, semblable à la troisième. Par un système complexe de balanciers, elles actionnent les pompes de la station de puisage.

   Le vent est réchauffé, aux environs de 300°, dans des appareils du type Calder. Les premiers appareils, mis en service en 1843, se composent d'une série de siphons en fonte, fortement inclinés, parcourus par le vent. Ils sont placés dans une enceinte maçonnée et léchée extérieurement par des fumées provenant de la combustion de gaz du gueulard.

   La faible durée des tuyaux en fonte, surtout des parties courbes, fait remplacer, en 1863, les tubes inclinés par des tubes verticaux, cloisonnés.

Transformation perpétuelle des Hauts-fourneaux

   En 1877, ces appareils sont abandonnés, et quatre Cowpers, qui portent le vent à 700°, sont construits à leur place.

Les besoins de fonte s'accroissant, un troisième haut fourneau, monté sur colonnes, est mis à feu en mai 1870. Il sera arrêté définitivement, en 1881.

   Givors fut l'une des premières usines en France à consommer d'importantes quantités de résidus de grillage des pyrites. Leur emploi est envisagé dès 1877. En 1900 fonctionne une installation de malaxage, brassant avec de la chaux, en un mortier épais, des pyrites de Penarroya, venant de l'usine de Pierre-Bénite. 

  En 1906, deux presses Bietrix-Couffinhal, installées dans l'ancien hall de coulée du haut fourneau N° 3, produisent, avec addition de chaux, des briquettes qui sont cuites sur les grilles de fours fixes.

   Dès 1853, des fours à coke vinrent s'adjoindre aux hauts fourneaux. Six cellules, portées progressivement à quarante-quatre, en trois batteries, produisent en 1863: 1030 tonnes de coke; en 1868 : 1700 tonnes, par mois.

   Les premiers fours, du type à flammes perdues, furent remplacés par des fours à récupération de chaleur; les fumées circulaient dans des chaudières verti­cales situées en bout de chaque batterie.

   Le charbon, stocké sur une aire plane, était amené à des broyeurs Carr, par dragues. Le charbon broyé glissait dans des wagonnets, roulant au-dessus des fours. Pour assurer le défournement, une machine à vapeur fixe, par batterie, trans­mettait, par arbre et poulies coulissantes, un mouvement de rotation à une machine, mobile le long de la batterie, dite « repoussoir ». La crémaillère de cette machine poussait le saumon de coke sur une aire horizontale. Des ouvriers munis de piques, de part et d'autre du mur de coke incandescent le maintenaient en équilibre jusqu'à ce qu'il soit entièrement sorti du four. L'arrosage à la lance ne s'effectuait qu'à partir de ce moment.

   Ainsi, depuis la création de l'Usine, et jusqu'en fin 1912, nous assistons au développement et à l'amélioration progressifs des installations anciennes. La capacité des hauts fourneaux est portée à 1200 tonnes de fonte par mois, mais c'est là un maximum que le profil, limité dans ses dimensions transversales par l'imposant corset en maçonnerie que constitue la charpente, ne permet pas de dépasser.

Il n'y a pas de manutention mécanique des matières brutes ou manufacturées, pas d'épuration secondaire des gaz, et l'entretien et le rendement de tous les appareils utilisateurs en souffrent. Les sous-produits de distillation de la houille ne sont pas récupérés. Enfin, il n'existe point de centrale électrique, rassemblant en un tout cohérent la commande des diverses sections de l'Usine.

Les Cadres - 1900

Les électriciens - 1900

  Pour lutter contre la concurrence sans cesse croissante, un effort considérable est devenu indispensable. Il appartient à Monsieur Edouard Prénat, aidé par son fils, Mon­sieur Louis Prénat, d'entre­prendre cette transformation radicale.

   C'est la tâche à laquelle ils se consacrent dès lors, et, de 1913 à 1920, avec l'appui des Aciéries de la Marine et d'Homécourt, de nouvelles installations, très modernes, remplacent les anciens Ateliers de carbonisation et de production de fonte brute. Presque simultanément s'élèvent la centrale électrique, les fours à coke avec leurs ate­liers de sous-produits, les ponts sur le Garon et les accumula­teurs à minerais et à charbons, l'épuration des gaz, le haut fourneau Joffre, mis à feu en 1918. — Le haut fourneau France suit, allumé en 1922. Les vieux fours à coke, les hauts fourneaux 1 et 2 sont rasés au fur et à mesure qu'ils sont re­layés par les appareils nouveaux. En 1922, l'Usine, moderne, a pris, avec une configuration très différente, l'aspect qu'elle présente encore en 1949. Cependant, d'autres améliorations ou modifications de détail interviendront encore, dictées par le souci constant du perfectionnement.

 

Pages précédentes 

Sommaire

 Pages suivantes

Sources Textes et photos :
Plaquette éditée à l'occasion des fêtes du centenaires des Établissement Prénat de Givors. 1949 et Archives municipales de Givors

Copyright © 2001 [Yves Chapuis]. Tous droits réservés.   Révision : 17 janvier 2008 . yves.c@free.fr