La Vie Ouvrière au Début du XXe Siècle à Givors

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Chanson : le Vieux Givors    

C'est 5 000 tonnes de charbon qui arrivent chaque année à Givors, transportées tous les jours par 1 200 mulets de bât qui repartent vers le bassin houiller de la Loire chargés de fourrages et autres denrées stockées sur le port rhodanien. Les bateaux qui remontent le Rhône, lourds du sel des salins du midi, des denrées coloniales, des vins de Provence ou du Languedoc, s'en retournent porteurs de bois, planches et tonneaux vides, chargés de charbon de terre et de quincaillerie de la Loire, de verrerie, de fers, de cordages, d'armes et de munitions destinées aux arsenaux de Marseille et de Toulon.

Introduction 3    

C'est Givors, pays des mariniers du Rhône entourés des nombreuses corporations liées à la batellerie. Cette activité s'accentua lors de la mise en service, en 1780, du canal reliant Givors à Rive-de-Gier; si l'activité muletière y trouva sa ruine, celle du canal devint florissante, atteignant son apogée en 1827 avec un transit supérieur à 300 000 tonnes. Pour le remorquage des bateaux, on employait non des chevaux ou des ânes, mais des hommes auxquels on donnait le nom de "margoulins". La navigation du canal s'est arrêtée en 1878; déclassé en 1955, il a été comblé et sur son tracé on a construit l'autoroute reliant Lyon à Saint-Étienne.

 

Au cours du XIXe siècle, les progrès de la mécanisation s'accentuent et partout on note une accélération des besoins énergétiques: les fours des verreries, les machines à vapeur toujours plus nombreuses exigent davantage de charbon. Dans le même temps, la production houillère s'accroît et celle du bassin de la Loire passe de 280 000 tonnes en 1812 à 560 000 tonnes en 1825. L'acheminement du charbon se heurte au mauvais état des routes, à la lenteur des communications et aux prétentions exagérées des actionnaires du canal dont la compagnie double ses tarifs en 1821. La grande révolution viendra du chemin de fer car, quand les transports coûtaient 2F par voie d'eau, 1F par le roulage, il offrait un tarif de 0,39F, capable d'anéantir toute concurrence.

C'est en 1826 que commence la construction de la ligne Lyon Saint-Étienne, le premier chemin de fer de France qui sera ouvert à l'exploitation en trois étapes: Givors Rive-de-Gier le 28 juin 1830; Lyon Givors le 3 avril 1832, et Rive-de-Gier Saint-Étienne le 1er octobre 1832. Un contemporain rapporte: "Le chemin de fer est en pleine activité de Givors à Rive-de-Gier; il a dépassé toutes les espérances des entrepreneurs sous le rapport des moyens de transport. On n'osait pas espérer qu'une pente aussi douce que celle de Rive-de-Gier au Rhône fût suffisante pour faire marcher avec vélocité les wagons. On avait pensé qu'il faudrait peu de chevaux, mais qu'il en faudrait. Eh bien, vingt wagons abandonnés à leur propre impulsion se rendent à Givors avec une rapidité telle qu'en vingt minutes ils parcourraient près de trois lieues,(1 lieue = 4,4448 kilomètres), si l'on n'avait pas la précaution de les enrayer un peu, afin d'éviter les accidents qui pourraient résulter d'une semblable vélocité". Curieux spectacle que ces chevaux faisant leur descente dans un wagon spécial puis, attelés au convoi, assuraient la remonte. Mais bientôt, la locomotive faisait son apparition et dès 1844 la traction mécanique remplaçait partout et définitivement la traction animale. Givors entrait dans l'ère de la vapeur, dans l'âge de la révolution scientifique et technique.

Le Pont des Fainéants  

Pour associer l'activité du chemin de fer à la voie fluviale, on creusa dès 1830, un nouveau port: la gare d'eau. Ce nouveau port connut un succès immédiat et, dès 1835, il se classait avec 570 000 tonnes de marchandises premier port rhodanien devant Lyon qui atteignait 295 000 tonnes.

Deux brigades de crocheteurs se partageaient le déchargement des wagons: les uns, regroupés dans la brigade rouge, se distinguaient des autres crocheteurs par la couleur rougeâtre que donnait à leur vêtements le minerai qu'ils débardaient; les autres, attachés au déchargement du charbon, formaient la brigade noire. Sur le pont qui franchissait la gare d'eau, une foule de journaliers, de déclassés ou de chômeurs, étaient là dans l'espoir d'un bateau à décharger, en quête d'un travail: c'est le pont des fainéants.

La mise en service du chemin de fer provoque à Givors une véritable explosion démographique, entraînant vers cette nouvelle métropole industrielle les populations rurales du canton, mais aussi une population étrangère: le nombre des habitants double en quelques années. Autour de la gare d'eau des entrepôts, des usines, de nouveaux quartiers naissent et grandissent. Des hauts fourneaux sortent de terre: le premier en 1839, le second en 1845, le troisième en 1855. C'est la création de la compagnie des hauts fourneaux et fonderies de Givors - Établissements Prénat. "C'est une véritable usine champignon, bâtie à proximité du charbon, pouvant facilement s'approvisionner en minerai de fer et expédier sa production par voie terrestre ou fluviale". 

Four à Coke   

13 ans, ouvriers 

A la sidérurgie vient s'ajouter la métallurgie avec, en 1861, l'implantation de la compagnie Fives-Lille qui assure la fabrication de matériels ferroviaires (en 1861 elle livre 30 locomotives aux chemins de fer P.L.M. et de matériel d'artillerie, de générateurs à vapeur, de matériel pour sucreries. A partir de 1890, l'usine de Givors entreprend la construction des appareils destinés aux applications de l'électricité à la mécanique générale, à l'électro-chimie, à l'électro-métallurgie et à la traction électrique. En 1911, elle compte 350 machines-outils et occupe plus de mille ouvriers.

Les Usines Fives-Lille

Témoignage: la vie dans les Usines Fives-Lille 1910    

Témoignage: Le travail dans les Ateliers de Fives-Lille 1910    

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(document audio réalisé en 1980 par M. Deville - Photographies Archives Ville de Givors )

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